Un rappel à l’Ordre sur les écrits en santé au travail

par / 09 novembre 2015

Dans une lettre ouverte, deux médecins du travail demandent au Conseil national de l’Ordre de revoir sa position concernant les certificats attestant du lien entre santé et travail, qu’ils jugent inadaptée au regard des pratiques médicales en la matière.

Dans une lettre ouverte datée du 23 octobre, adressée au président du Conseil national de l’ordre des médecins (Cnom), deux médecins du travail, Philippe Davezies et Christian Torres1, attirent son attention sur « les procédures disciplinaires engagées contre une série de confrères pour leurs prises de positions dans des affaires de santé au travail »« Nous sommes manifestement confrontés à une campagne qui vise à dissuader l’expression des médecins sur les liens entre la santé et le travail », écrivent-ils.

Pétition

Ce courrier signe un nouvel épisode de ce feuilleton qui agite le monde de la santé au travail, depuis que des médecins du travail, mais aussi des psychiatres ou des généralistes, sont poursuivis devant les juridictions ordinales par des employeurs pour avoir rédigé des certificats ou de simples courriers à des confrères établissant un lien entre l’état de santé de leur patient et des expositions professionnelles. Une pétition, demandant une révision du texte qui permet aux employeurs d’engager ce type de procédures, a rassemblé plus de 10 000 signatures, à l’initiative notamment de l'association Santé et médecine du travail et du Syndicat national des professionnels de la santé au travail (SNPST). Une lettre ouverte, rédigée par une trentaine de parlementaires et soulevant le risque de rupture du secret médical à l’occasion de ce type de procédures, a également été adressée à la ministre de la Santé.

Méconnaissance du système de reconnaissance

En désaccord avec ces revendications, les Drs. Davezies et Torres ont souhaité porter le débat sur un autre terrain. Pour eux, les positions affichées par le Cnom concernant les certificats médicaux en santé au travail témoignent d’une méconnaissance de cette pratique, et notamment du système médico-réglementaire de reconnaissance des maladies professionnelles dans lequel ils s’inscrivent comme des obligations qui pèsent sur le corps médical dans ce domaine. Pour eux, les critères proposés par le Cnom pour évaluer le caractère déontologique des certificats médicaux dans le domaine de la santé au travail ne sont pas adaptés. Au terme d’une démonstration très poussée, les deux médecins du travail estiment qu’« en proposant des critères déontologiques inadaptés au champ de la réparation des atteintes à la santé par le travail, l’Ordre a généré une grande confusion, a fourni, aux employeurs un puissant moyen de pression sur les médecins préoccupés par les questions de santé au travail et a fait planer un climat de menace sur la production d’attestations en matière de santé au travail ». Selon eux, « il importe de sortir au plus tôt de cette confusion, de mettre un point d’arrêt à l’actuelle campagne d’intimidation des médecins ». « Cela implique de revenir sur les principes inadaptés adoptés par le Conseil national et d’élaborer un cadre déontologique qui, au lieu de de l’entraver, soit susceptible de soutenir le développement d’une activité médicale juste, dans le domaine très particulier de la santé au travail », concluent-ils.

 

1. Philippe Davezies et Christian Torres sont tous les deux membres du comité de rédaction de notre magazine.

LA TENSION AU TRAVAIL AUGMENTE LE RISQUES D’AVC

Dans une méta-analyse regroupant six études de cohortes prospectives, comprenant au total 138 782 sujets,  publiée sur le site de Neurology (journal de l’Académie américaine de neurologie), une équipe de chercheurs a montré que l’exposition au job strain (stress professionnel) augmentait le risque de survenue d’accidents vasculaires cérébraux (AVC). Les résultats sont particulièrement marqués pour les accidents ischémiques et les femmes exposées à une forte tension au travail.

A LIRE AILLEURS SUR LE WEB
  • – Une étude sur le travail du dimanche en 2014, publiée en octobre dans Dares analyses et explicitée par DataMatch, indique que près d’un salarié sur cinq est concerné chaque mois.

    – Un article de Libération sur le conflit à Paris Habitat portant sur les conditions de travail.