© NATHANAËL MERGUI / MUTUALITÉ FRANÇAISE
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Menace sur les consultations de pathologies professionnelles

par François Desriaux / juillet 2014

La branche accidents du travail-maladies professionnelles de la Sécurité sociale vient d'annoncer une réduction de sa dotation aux centres de consultations de pathologies professionnelles. Une décision qui les met en danger.

Dominique Martin, le directeur de la prévention des risques professionnels (DRP) de la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam-TS), a beau vouloir se montrer rassurant, sa décision de réduire la dotation versée par la branche accidents du travail-maladies professionnelles (AT-MP) de la Sécurité sociale aux consultations de pathologies professionnelles, installées dans les centres hospitaliers universitaires, est très mal vécue. Moins 10 % par an jusqu'en 2017. C'est l'annonce faite le 10 juin lors d'un comité de pilotage du Réseau national de vigilance et de prévention des pathologies professionnelles (RNV3P). Ce réseau est coordonné par l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) pour assurer une vigilance sur les maladies liées au travail et détecter de nouvelles pathologies professionnelles, à partir des données collectées par les consultations de pathologies professionnelles du territoire. Il se voit aussi privé des 50 000 euros annuels versés par la branche AT-MP pour son fonctionnement. "C'est à l'Etat de prendre en charge ce budget, estime le DRP. Quant aux 10 % de réduction des sommes allouées aux consultations pour 2014, tout le monde est logé à la même enseigne : ce sont les mesures d'économies décidées nationalement et qui affectent l'ensemble des budgets de la Sécurité sociale. Pour les années suivantes, les 10 % annuels de réduction seront mis en réserve, à titre de précaution. L'objectif est de renégocier nos relations avec les consultations et ce qu'on finance exactement. Actuellement, ce n'est pas clair, cela varie d'une région à l'autre. Mais si on aboutit à un accord, les sommes seront redistribuées."

Casser le thermomètre

Dans leur ensemble, les enseignants de médecine du travail qui gèrent ces consultations considèrent que c'est un mauvais coup porté à la prévention et à la réparation des maladies professionnelles. Ainsi, Jean-Dominique Dewitte, professeur de santé au travail à Brest et président du comité de pilotage du RNV3P, a été surpris par la brutalité et l'ampleur de cette annonce. "On s'attendait à une baisse de cette subvention, mais on nous avait promis qu'elle se ferait dans la concertation. Or il n'y a eu aucun échange. On peut chacun faire des efforts et s'en sortir sans toucher à l'essentiel de la prise en charge des patients avec 10 % en moins. Avec 40 %, c'est impossible." Pour son collègue de Nancy, Christophe Paris, "c'est le thermomètre qu'on veut casser. Avec ces consultations, nous participons à la reconnaissance des maladies professionnelles. Si elles ferment ou sont moins efficaces, ce seront autant de malades qui seront pris en charge par le régime général, aggravant le déficit de celui-ci". Même si le DRP se défend de toute arrière-pensée, plusieurs enseignants en médecine du travail craignent que l'objectif de la mesure soit précisément de "réduire une source de reconnaissance de nombreuses maladies professionnelles".